Par Didier SAMSON
L’archipel de Tuvalu est composé de 9 petites îles dont 2 ont déjà disparu sous les eaux. La sonnette d’alarme est tirée. En quelque 80 ans, l’archipel n’existera plus. Les habitants sont en panique. Et comme gouverner c’est prévoir, le Premier Ministre de l’archipel Kausea Natano a pris les devants et est allé négocier le grand déménagement. Eh oui, rien que ça !
Le traité de coopération climatique et diplomatique présenté le vendredi 10 novembre 2023 marque le début d’un changement autre que météorologique. Ensemble, les Premiers Ministres australiens, Anthony Albanese et tuvaluan Kausea Natano ont présenté un plan de secours et d’assistance assumé par l’île continent, l’Australie. Outre les plans initiés depuis 2017, l’Australie va injecter à nouveau « 16,9 millions de dollars pour renforcer et étendre les terres de l’île principale, Funafuti d’environ 6 % de sa surface ». L’ensemble de l’archipel fait actuellement 26 km².
Toutefois, l’objet principal de ce traité n’est pas dans la modique somme avancée pour une assistance technique. On sait bien que ce ne sont pas quelque 17 millions de dollars qui sauveront les Tuvalu du naufrage. Ce ne sont que des frais « d’ensevelissement honorable », car il s’agit bien ici de chronique d’une mort annoncée.
Sur le vaste territoire australien, quelque part dans le nord, les Tuvaluans sont cordialement invités à s’installer. Mais pas n’importe comment. Pour éviter un effet Exodus, Anthony Albanese a prévu d’accueillir 280 Tuvaluans par an. Tout compte fait, en un peu plus de 30 ans, c’est-à-dire une génération, tout le monde aurait déjà fui l’archipel qui compte actuellement quelque 11 000 habitants.
Un pays disparait faute de terre
Le changement climatique est sur toutes les lèvres. On en parle à grands frais. Certains s’en désolent, mais pour d’autres c’est déjà la fin du monde. La terre, en moins de 100 ans, s’est réchauffée de plus de 1 °C. « C’est énorme », disent les climatologues. Est-ce un processus normal ? Non ! répondent-ils. Les activités humaines en seraient les premières causes, ce qui explique les vagues de sécheresses, les cyclones à répétition et surtout la fonte des glaciers avec comme corollaire, l’augmentation du niveau des mers. Elles débordent sur les terres, les envahissent, les couvrent et y restent. À Tuvalu où le plus haut relief culmine à 5 mètres, tout est à portée de flot.
Tuvalu va donc disparaitre avec son histoire inondée. Depuis le 1er millénaire avant Jésus-Christ, cet archipel était habité. Aujourd’hui, la mer va engloutir les vestiges de ces femmes, hommes et enfants résilients qui vont aussi, ailleurs, faire le deuil de leur culture plusieurs fois millénaire. Ailleurs en Australie, on leur offre d’y vivre, d’étudier et de travailler. Fini, Tuvalu. Adieu cocotiers et cochons ! Vive les kangourous et l’immensité de terre, et bonjour la mobilité climatique.
Les décideurs tuvaluans baignant dans la résilience bien connue des insulaires ont su empocher leur fierté et leur citoyenneté pour échapper aux eaux envahissantes et pour sauver leur tête. Là-bas, sauront-ils préserver une identité tuvaluane ? Rien n’est moins sûr. Alors que 900 000 Aborigènes, population autochtone, ont du mal à exister dans leurs identité et culture, sur leur sol, que vaudront 11 000 Tuvaluans noyés dans une population de 25 millions d’Australiens ? Changement climatique, asile climatique, mobilité climatique… le texte fondateur de la nouvelle donne terrestre est né dans le pacifique.